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Juridique
Préserver/Restaurer la confiance du consommateur : quelles en sont les clés, quels doivent en être les gages ?
Nejra Périon
Pour tout observateur attentif de la sphère BtoC et particulièrement du secteur des produits de grande consommation, le constat est aisé. La vision uniforme, percevant le prix comme seul avantage concurrentiel a conduit à occulter assez largement, l'exigence accrue des consommateurs en matière de transparence, de qualité, de sécurité, d'information.
Si d'autres explications d'ordre anthropologique et sociologique existent, c'est aussi et en grande partie, cette vision qui a contribué à faire émerger deux paradoxes.
Le premier, tient à ses effets contreproductifs en termes de concurrence, « la guerre des prix » ne bénéficiant pas toujours au consommateur pas plus qu'aux opérateurs économiques eux-mêmes et donc au marché.
Le second, tient dans « la défiance du consommateur » que nous constatons au gré de nombreux sondages qui en font l'état et qui a atteint le paroxysme sous l'effet des derniers « scandales sanitaires » alors même que la fabrication et la commercialisation des produits n'a jamais été aussi encadrée.
Observée désormais depuis plusieurs années, cette défiance se manifeste non seulement, par des mouvements de « déconsommation » (de certaines catégories de produits), la progression de nouveaux marchés perçus comme étant plus « sûrs » et/ou plus« qualitatifs » (« Bio », circuits courts, produits « sans », produits artisanaux, produits « Made in France »[1]) mais aussi par le recours significatif aux sources d'informations alternatives telles les applications pour smartphones de notation des aliments et de produits cosmétiques.
En d'autres termes, le consommateur d'aujourd'hui est non seulement inquiet, suspicieux mais également convaincu que les produits ne présentent pas ou présentent moins de garanties en matière de sécurité et de qualité, alors qu'en réalité, c'est précisément le contraire.
Le seul souvenir de l'état du droit européen en matière de protection des consommateurs avant les crises alimentaires des années 2000 suffit à mesurer le chemin parcouru depuis. En effet, la protection des consommateurs a été introduite timidement. D'abord appréhendée de manière hétérogène au gré de références diffuses dans les Traités, de précisions du droit dérivé[2] ou encore de mesures en matière de santé publique, la protection des consommateurs a finalement fait l'objet d'une vague d'harmonisation et d'un renforcement significatif à partir des années 2000 (ex : les très nombreuses directives harmonisées, les nombreux règlements en matière de denrées alimentaires).
Pour autant, le cadre législatif et règlementaire actuel ne semble pas être de nature à « rassurer », l'empilage de textes européens et nationaux, montrant sans doute à cet égard, quelques faiblesses si ce n'est des limites en termes de lisibilité et de pédagogie.
Si au niveau national, le code de la consommation a été recodifié et permet désormais une meilleure appréhension des textes, il convient de souligner que les dispositions très récentes, issues des lois dites EGALIM[3] et PACTE[4] prises dans le sillage des dernières crises particulièrement médiatisées, ne sont pas pour autant substantielles. Pour l'essentiel, en matière de protection des consommateurs, ces lois renforcent légèrement les obligations en matière de retrait/rappel des produits en instaurant l'obligation pour les producteurs et les distributeurs d'établir et maintenir à jour un état chiffré des produits retirés ou rappelés, qu'ils doivent tenir à la disposition des agents de l'administration et déclarer sur un site internet dédié, mis à la disposition du public. Le non-respect de ces obligations est assorti d'une sanction administrative de 5.000 euros[5].
Au niveau européen, la lisibilité des dispositions demeure toujours aussi complexe faute de consensus pour la mise en œuvre de nouvelles mesures annoncées depuis quelques années[6].
Autre syndrome, à l'ère de l'information instantanée accessible par tous, le consommateur, s'il ne doute pas de la fiabilité de l'information fournie par les opérateurs, se déclare non suffisamment informé[7].
Si l'on ajoute à ces paradoxes, ce que certains auteurs ont appelé à juste titre, « le pouvoir du consommateur acteur » qui se veut désormais « consommateur militant, en quête de sens » , le constat d'une nouvelle ère en matière de consommation relève de l'évidence tout comme la nécessité pour les acteurs économiques de s'y adapter et donc de répondre avant toute chose aux questions fondamentales qui émergent du constat : Comment restaurer et préserver durablement la confiance de ce consommateur nouveau ? Quelles en sont les clés ? Quels doivent en être les gages ?
Certes, des acteurs concernés se sont saisis de ces questions.
Ainsi une série d'actions a été mise en œuvre par les organisations professionnelles, les autorités, ou encore dans le cadre de démarches individuelles d'entreprises destinées à valoriser les produits à travers notamment, une amélioration de l'information du consommateur, des démarches qualité qui se veulent visibles et lisibles et/ou participatives[8].
De même, les derniers « scandales sanitaires » ont conduit à un certain nombre de travaux destinés à optimiser davantage la gestion de crises produits car en la matière, et les qualiticiens le savent bien, il est essentiel et toujours possible de s'améliorer[9].
Or ces actions ne peuvent avoir d'effet durable et efficient que si elles résultent d'une transformation de fond et qu'à la condition de pouvoir être objectivées et justifiables c'est-à-dire loyales et conformes.
En la matière, les pistes à explorer et les chemins à investir sont nombreux. Cela étant, toute démarche de valorisation qui a nécessairement pour effet d'accroître la responsabilité des auteurs, garants des allégations portées, ne saurait être entreprise sans une implication de l'ensemble des opérationnels concernés et une assurance préalable de la connaissance exhaustive des enjeux et des risques.
A cet égard, la conformité à la règlementation et à la législation est une donnée de maîtrise incontournable.
De même, on ne peut pas penser la gestion d'une « crise produits », porteuse d'atteinte à l'image aux conséquences instantanées et durables, sans le traitement global et simultané des questions opérationnelles mais aussi juridiques. Sur ce point en particulier, l'expérience montre que l'assurance d'une crise maîtrisée impose d'agir par prévention et par anticipation pour si ce n'est éviter, à tout le moins limiter, les impacts en procédant à une évaluation régulière, par des tiers, du dispositif de gestion de crise dans tous ses aspects en ce compris réglementaires (procédures, contractualisation, concordance amont/aval etc.).
Indissociablement, il paraît tout aussi essentiel de s'interroger sur la compréhension par les parties prenantes de la définition même d'une « crise produits » qui ne doit pas et ne peut plus être appréhendée sous le seul prisme d'une gestion de situations de retrait/rappel produits lorsqu'elles se présentent. Ainsi, en pratique, une réclamation consommateurs quel que soit le canal de communication est indiscutablement et à bien des égards, une « crise produits » dont la gestion par les seuls services dédiés peut s'avérer assez largement contreproductive et/ou génératrice de nouveaux risques.
A l'évidence, l'impératif de restaurer et/ou préserver la confiance du consommateur exige d'œuvrer de manière proactive et transversale en assurant une cohérence d'ensemble.
[1] Par exemple, l'étude OpinionWay réalisée du 17 au 18 avril 2019 sur un échantillon de 1057 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, établit que les consommateurs français sont principalement et très largement tournés vers la qualité (88%), le « made in France» (87%) et les produits « bons pour la santé » (87%)
[2] Par ex : Directive 92/59 du 29 juin 1992 relative à la sécurité générale des produits, Directive 84/450 du 10 septembre 1984 relative à la publicité trompeuse, Directive 85/374 du 25 juillet 1985 relative à la responsabilité du fait des produits défectueux ou encore les directives relatives aux denrées alimentaires dont la Directive 79/112 du 18 décembre 1978 portant sur l'étiquetage
[3] Loi n°2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous
[4] Loi n°2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises
[5] Art. L.423-3 et L.452-7 du Code de la consommation
[6] Ex. Paquet législatif en matière de sécurité des produits et de surveillance du marché
[7] Il résulte de l'étude précitée que les informations sur les emballages sont perçues comme étant « peu fiables » (44%), «peu complètes» (63%), «peu transparentes» (62%) «insuffisantes» (61%) et «imprécises» (58%)
[8] A titre d'exemple signalons le déploiement (pour l'heure facultatif) de l'étiquetage « nutri-score » des produits alimentaires ou encore la mise en place progressive par la DGCCRF de la plateforme « signalconso » qui devrait être accessible sur tout le territoire national d'ici 2020, destinée à assurer un signalement rapide par les consommateurs d'anomalies liées aux produits de grande consommation constatées dans les magasins aux fins de transmission aux commerçants pour actions correctives rapides ;
[9] Cf. Le rapport du Conseil National de la Consommation (CNC) du 17 juillet 2018 « Amélioration de l'efficacité des procédures de retrait-rappel des produits de consommation courante »
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