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Fiscalité des entreprises
La loi Etat au service d’une société de confiance (ESSOC) : de nouvelles opportunités de sécurité juridique pour les contribuables ?
Jean-Pierre Lieb - Charles Ménard - Pascal Schiele
La loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un Etat au service d'une société de confiance (ESSOC) crée de nouvelles possibilités de régularisation, aménage les sanctions applicables dans ces situations et renforce certaines garanties du contribuable.
1. Extension des situations de régularisation et aménagement corrélatif des sanctions applicables
1.1. Réduction de l'intérêt de retard en cas de rectification spontanée avant contrôle
Comme on le sait, la loi de finances pour 2018 n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 a ramené le taux mensuel de l'intérêt de retard de 0,4% à 0,2%.
L'article 5 de la loi ESSOC aménage à nouveau le taux de l'intérêt de retard en prévoyant de le ramener à 0,1% lorsque les conditions suivantes sont réunies :
- Le contribuable est de bonne foi,
- La déclaration initiale a été déposée dans les délais légaux (la réduction du taux de l'intérêt de retard ne s'applique donc pas en cas de retard ou de défaut de déclaration),
- La déclaration rectificative est déposée spontanément, i.e. elle n'est pas suscitée par l'engagement d'une procédure de contrôle ou une demande d'information de la part de l'administration,
- La déclaration rectificative est déposée avant l'expiration du délai de reprise et est accompagnée du paiement des droits en principal, sauf si l'impôt en cause est recouvré par voie de rôle (dans ce cas, le paiement devra intervenir au plus tard à la date limite de paiement mentionnée sur l'avis d'imposition supplémentaire)
La mesure, codifiée au V de l'article 1727 du CGI, s'applique aux déclarations rectificatives déposées à compter de la publication de la loi.
2. Renforcement des garanties du contribuable
La loi ESSOC comporte dès son article 2 plusieurs dispositions de nature générale qui s'inscrivent dans l'objectif incarné par son chapitre Premier et intitulé « Une administration qui accompagne ». Ces dispositions, qui viennent enrichir le code des relations entre le public et l'administration, comportent notamment :
- la reconnaissance d'un droit à régularisation en cas d'erreur qui s'applique aux personnes de bonne foi et en l'absence de fraude ayant méconnu la première fois une règle applicable ou ayant commis une erreur matérielle lors du renseignement de sa situation. La régularisation spontanée ou sur invitation par l'administration dans le délai indiqué par cette dernière permet d'échapper aux sanctions pécuniaires …… ;
- la création pour toute personne du droit de solliciter un contrôle sur des points précis de conformité, l'administration devant procéder à celui-ci dans un délai raisonnable (article L. 124-1 du code des relations entre le public et l'administration) ;
- la possibilité, lorsqu'une personne a usé de son droit de solliciter un contrôle, de se prévaloir des conclusions expresses de celui-ci jusqu'au changement de circonstances ou de fait postérieur de nature à en affecter leur validité ou jusqu'à ce que l'administration procède à un nouveau contrôle donnant lieu à de nouvelles conclusions expresses.
Ces dispositions sont susceptibles d'être invoquées en matière fiscale et douanière dès lors que le législateur n'a pas entendu en limiter la portée, comme il a pu le faire en matière de santé publique, de sécurité des personnes et des biens ou encore en matière d'environnement. L'avenir dira comment le juge les articulera avec les déclinaisons spécifiques de ces principes qu'introduit la loi ESSOC en matière fiscale.
Une dernière disposition de portée générale qui figure à l'article 4 mérite également d'être relevée car susceptible, là encore de s'appliquer en matière fiscale et douanière. Celle-ci précise que l'administration ne peut conduire à suspendre l'instruction d'un dossier déposé par un usagé en vue de l'attribution d'un droit au motif de l'existence d'une pièce manquante non indispensable pour cette instruction. Bien évidemment, si la pièce fait toujours défaut au moment de la décision d'attribution du droit concerné, cette dernière n'est effective qu'après la réception de la pièce manquante. Cette disposition pourrait notamment impacter les modalités d'instruction des demandes de rescrit ou d'agrément adressées aux administrations fiscales et douanières.
2.1. Création d'un recours hiérarchique en cas de contrôle sur pièces
Jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi ESSOC, le contribuable qui faisait l'objet d'un contrôle sur pièces pouvait demander à rencontrer le supérieur hiérarchique de la personne ayant signé la proposition de rectification mais se heurtait le plus souvent à un refus, le service le renvoyant vers le conciliateur fiscal départemental dont l'intervention n'est prévue qu'après mise en recouvrement des impositions et décision de rejet ou d'admission partielle.
Pour les rectifications notifiées à compter de son entrée en vigueur, l'article 12 de la loi ESSOC, codifié à l'article L 54 C du LPF, ouvre au contribuable qui a fait l'objet d'un contrôle sur pièces selon la procédure de rectification contradictoire la possibilité d'exercer un recours auprès du supérieur hiérarchique de l'agent des impôts ayant procédé au contrôle.
Toutefois, la portée exacte de cette nouvelle garantie et son articulation avec la demande de saisine du conciliateur fiscal départemental restent à préciser.
En effet, à la différence du recours hiérarchique prévu en matière de contrôle fiscal externe (vérification et examen de comptabilité ; examen de situation fiscale personnelle) qui peut intervenir après la proposition de rectification et, en tout état de cause avant la mise en recouvrement, le nouveau recours institué en matière de contrôle sur pièces peut être exercé « dans le délai imparti pour l'introduction d'un recours contentieux ». Le recours peut donc, aux termes de la loi, être formé soit à réception de la proposition de rectification, soit à n'importe quel autre stade de la procédure, y compris après la mise en recouvrement des impositions contestées. Dans ce dernier cas, le contribuable devra-t-il avoir exercé ce recours hiérarchique avant de saisir le conciliateur fiscal départemental ou le recours hiérarchique se substituera-t-il au conciliateur fiscal départemental ?
Les commentaires administratifs sur ce point seront les bienvenus.
Par ailleurs, l'article L 54 C du LPF dispose que le recours hiérarchique suspend le cours du délai contentieux qui pourra être, soit le délai spécial de réclamation prévu en cas de procédure de reprise par l'article R 196-3 du LPF, soit le délai général de réclamation prévu aux articles R 196-1 et R 196-2 du LPF. Il s'ensuit qu'à la date de notification de la décision du supérieur hiérarchique au contribuable, celui-ci disposera d'un nouveau délai de même durée que celui qui a été interrompu pour introduire une réclamation contentieuse qui, seule si elle est accompagnée d'une demande de sursis de paiement, permettra de suspendre le recouvrement de l'imposition contestée.
2.2. A titre expérimental, limitation de la durée globale des contrôles des PME
L'article 32 de la loi ESSOC prévoit que l'ensemble des contrôles dont peuvent faire l'objet les entreprises de moins de 250 salariés qui réalisent au plus 50 millions d'euros de chiffre d'affaires, établies dans les régions Hauts-de-France et Auvergne-Rhône-Alpes ne pourra dépasser une durée cumulée de neuf mois sur une période de trois ans.
Cette expérimentation, d'une durée de quatre ans, concerne tous les contrôles opérés par les administrations mentionnées à l'article L 100-3 du code des relations entre le public et les administrations, à savoir « les administrations de l'Etat, les collectivités territoriales, leurs établissements publics administratifs et les organismes et personnes de droit public et de droit privé chargés d'une mission de service public administratif, y compris les organismes de sécurité sociale ». On peut citer à titre d'exemple, les URSSAF, la DGFIP, la Direction Générale des Douanes et des Droits Indirects (DGDDI), les Directions Régionales des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l'Emploi (DIRECCTE), …
En revanche, sont exclus du champ de l'expérimentation les contrôles suivants :
- destinés à s'assurer du respect des règles prévues par le droit de l'Union européenne,
- destinés à s'assurer du respect des règles préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l'environnement,
- résultant de l'exécution d'un contrat,
- effectués par les autorités de régulation à l'égard des professionnels soumis à leur contrôle
En outre, la limitation n'est pas applicable lorsqu'il existe « des indices précis et concordants de manquement à une obligation légale et réglementaire. »
Afin de rendre la limitation effective, la loi prévoit que les administrations concernées s'échangent les informations utiles à la computation de la durée cumulée des contrôles entrant dans le champ de l'expérimentation. En outre, lorsque l'une des administrations concernées engagera un contrôle, elle informera l'entreprise concernée, à titre indicatif, de la durée du contrôle et avant le terme de la durée annoncée, de toute prolongation de celle-ci. A l'issue du contrôle, elle transmettra à l'entreprise les conclusions du contrôle et une attestation mentionnant le champ et la durée de celui-ci.
Dans l'attente du décret d'application, il n'est pas possible de déterminer si un nouveau document spécifique devra être remis à l'entreprise à cet effet ou si le document existant qui clôture une procédure (ex. la proposition de rectification) sera aménagé pour répondre à cette nouvelle obligation ou s'il sera considéré comme fournissant déjà les informations requises.
En tout état de cause, l'expérimentation fera l'objet d'une évaluation, « notamment de son impact sur les délais administratifs », dont les résultats seront transmis au Parlement 6 mois avant son terme.
2.3. Rescrit contrôle
L'article 9 de la loi complète également deux articles fondant la procédure de rescrit :
- d'une part, l'article L. 80 A du LPF en étendant son champ d'application aux situations dans lesquelles l'administration a pris position en toute connaissance de cause dans le cadre d'un examen ou d'une vérification de comptabilité ou d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, y compris tacitement par une absence de rectification ;
- d'autre part, le 2° de l'article L. 80 B en permettant au contribuable sur demande écrite et avant envoi de toute proposition de rectification dans le cadre d'un examen ou d'une vérification de comptabilité de solliciter une prise de position de l'administration sur un point examiné dans le cadre de ce contrôle. Deux dispositions analogues ont également été ajoutées s'agissant des contrôles et enquêtes menées en matière de contributions indirectes.
On notera toutefois que le législateur n'a pas entendu étendre la modification du 2° de l'article L. 80 B à l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle dans le cadre de cet article. Pour autant, la question se pose de savoir si un contribuable faisant l'objet d'une telle procédure ne pourrait pas invoquer les dispositions générales précédemment évoquées et notamment le nouvel article L. 124-1 du code des relations entre le public et l'administration.
Ces dispositions sont applicables à compter des avis adressés à compter de la publication de la loi et aux enquêtes effectuées à compter de cette même date.
Elles permettront ainsi aux contribuables de contraindre l'administration à prendre clairement position sur un point examiné lors du contrôle afin que ceux-ci bénéficient de la garantie offerte par l'article L. 80 A.
2.4. Garantie fiscale
Les modifications précédentes prennent un relief particulier à la lumière de l'article 11 qui complète l'article L. 40 du LPF en contraignant l'administration à indiquer explicitement au contribuable vérifié sur la proposition de rectification ou sur l'avis d'absence de rectification les points de contrôle, y compris lorsqu'ils ne comportent ni insuffisance, inexactitude, ni omission ou dissimulation. Cette règle s'applique également en matière de contributions indirectes au travers d'une modification corrélative de l'article L. 80 M.
En instituant une règle de transparence sur la nature et l'ampleur des contrôles effectués par l'administration, le législateur a clairement entendu renforcer la sécurité juridique des contribuables en forçant l'administration à prendre ses responsabilités. Le flou qui pouvait prévaloir sur les points effectivement examinés, mais aussi sur l'analyse faite par l'administration devrait logiquement disparaître.
Cela suppose toutefois que le service respecte scrupuleusement son obligation documentaire et mentionne de manière précise le champ de ses investigations. A cet égard, la pratique de plus en plus courante des comptes rendus d'étape rédigés par l'administration en cours de contrôle devraient en toute logique nourrir la liste des points de contrôle énumérés.
Remarquons qu'il s'agit là de la reprise d'une proposition faite il y a tout juste 10 ans par Olivier Fouquet dans son rapport « Améliorer la sécurité juridique des relations entre l'administration et les contribuables : une nouvelle approche ».
Il n'est toutefois pas à exclure que des divergences apparaissent entre les services de vérification et le contribuable sur l'exhaustivité de cette liste et la description précise du champ couvert par les investigations de l'administration. Le juge aura probablement à trancher ces questions et seule la capacité des parties à documenter de manière précise les échanges intervenus en cours de contrôle permettront de l'éclairer.
Il convient enfin de s'interroger sur les conséquences que ne manquera pas d'avoir cette obligation de documentation s'agissant des contrôles effectués sur le fichier des écritures comptables et notamment de l'obligation qui devrait en découler de lister les points ayant fait l'objet d'une vérification automatique par les logiciels de contrôle de l'administration.
Notons que ces dispositions ne rentreront en vigueur qu'aux contrôles dont les avis sont adressés à compter du 1erjanvier 2019.
2.5. Relation de confiance
Le législateur a habilité le Gouvernement à prendre par ordonnances, dans un délai de neuf mois à compter de la promulgation de la loi, toute disposition relevant du domaine de la loi modifiant le code général des impôts ou le livre des procédures fiscales en vue de renforcer la sécurité juridique des entreprises soumises à des impôts commerciaux. Il s'agit ici de donner un cadre législatif aux modalités particulières de relation entre l'administration et les entreprises qui avaient été expérimentées depuis 2013 par la DGFiP sous le nom de « relation de confiance », le cas échéant sous une forme renouvelée. En effet, il est attendu que le Gouvernement propose un régime permettant à l'administration d'examiner, le cas échéant sur place, sur demande des entreprises, la conformité de leurs opérations à la législation fiscale et de prendre formellement position sur l'application de celle-ci. Le projet d'ordonnance devra préciser les modalités d'accompagnement par l'administration ainsi que les moyens de publicité adaptés permettant la reconnaissance, notamment sous forme de labellisation, des entreprises engagées dans ce régime. Elles devront fixer, aux fins d'assurer un équilibre entre l'objectif de sécurité juridique poursuivi et les exigences de bonne administration, les critères permettant de définir les entreprises ou les catégories d'entreprises susceptibles de bénéficier de ce dispositif, en fonction notamment de leur taille, du caractère innovant ou complexe de leur activité ainsi que des enjeux fiscaux significatifs de leurs opérations.
L'administration a engagé, afin de nourrir sa réflexion, une consultation publique entre le 26 juillet et le 14 octobre via le portail de l'économie, des finances et de l'action et des comptes publics https://www.economie.gouv.fr/dgfip-consultation-entreprises-relation-confiance.
3. Sur les régularisations
3.1. Les dispenses d'amende en cas de régularisation
La loi ESSOC instaure deux dispenses d'amendes en cas de défaut de production de certains documents :
Légalisation de la tolérance administrative permettant la régularisation des déclarations devant être déposées au titre de l'article 240 du CGI (article 7)
Actuellement, l'article 1736 du CGI prévoit l'application d'une amende égale à 50% des sommes non déclarées, notamment, en cas de défaut de déclaration, ou d'omission dans la déclaration des commissions, honoraires et courtages prévue à l'article 240 du CGI. Cette amende n'est toutefois pas applicable en cas de première infraction commise au cours de l'année civile en cours et des trois années précédents, lorsque les intéressés ont réparé leur omission, soit spontanément, soit à la première demande de l'administration, avant la fin de l'année au cours de laquelle la déclaration devait être souscrite.
La doctrine administrative admet que, en cas d'absence de déclaration des rémunérations visées à l'article 240 du CGI, l'amende n'est pas applicable lorsque les deux conditions suivantes sont remplies (BOI-CF-INF-10-40-30 n°20) :
- il s'agit de la première infraction commise au cours de l'année civile en cours et des trois précédentes ;
- l'omission ou l'inexactitude est réparée soit spontanément, soit à la première demande de l'administration, avant la fin de l'année au cours de laquelle la déclaration devait être souscrite.
L'article 7 de la loi ESSOC est venu légaliser cette tolérance administrative en l'intégrant directement dans l'article 1736 du CGI. Désormais, afin de pouvoir régulariser sa situation sur trois années, la société devra remplir les conditions suivantes :
- la société présente pour la première fois une demande de régularisation ;
- la société est en mesure de justifier, notamment, par une attestation des bénéficiaires, que les rémunérations non déclarées ont été comprises dans les propres déclarations de ces derniers déposées dans les délais légaux, à condition que le service puisse être en mesure de vérifier l'exactitude des justifications produites.
Il convient de noter que :
- à la différence du premier alinéa de l'article 1736 du CGI, la notion de première infraction n'est pas retenue. La formulation de « première demande de régularisation » devrait permettre aux sociétés de régulariser de manière concomitante plusieurs infractions commises sur la période de trois ans. Des commentaires de l'administration pourraient venir préciser cette notion ;
- l'article 7 de la loi ESSOC prévoit expressément que cette demande de régularisation peut avoir lieu au cours du contrôle fiscal de la personne soumise à l'obligation déclarative.
La loi ne fournit aucune précision sur la date d'entrée en vigueur de ces dispositions. Cette dispense d'amende devrait donc entrer en vigueur le lendemain de la publication de la loi au JO (i.e. ; à compter du 11 aout 2018).
Absence d'application d'amende en cas défaut de production de certains documents en cas de régularisation
Actuellement, l'article 1763 du CGI prévoit l'application d'une amende égale à 5% (1% en cas de sommes réellement déductibles) des sommes omises le défaut de production, le caractère inexact ou incomplet des documents suivants :
- tableau des provisions ;
- relevé des frais généraux ;
- états spécifiques aux groupes intégrés,
- état et registre des plus-values en sursis d'imposition ;
- état de suivi des moins-values ;
- état de suivi des plus-values en cas de transfert du siège ou d'un établissement à l'étranger.
L'administration, par mesure de tempérament, admet la régularisation de l'état de suivi des plus-values en report d'imposition mentionné à l'article 54 septies du CGI lorsque deux conditions sont remplies :
- La démarche de la société est spontanée et n'est pas motivée par une quelconque demande de l'administration fiscale ;
- La situation déclarative de la société doit faire apparaitre une moralité fiscale irréprochable.
L'article 8 de la loi ESSOC instaure une possibilité de régularisation spontanée ou sur demande de l'administration des omissions commises par les intéressés.
Désormais, l'article 1736 du CGI prévoit qu'en cas de défaut de productions de ces documents, l'amende ne sera pas applicable en cas de première infraction commise au cours de l'année civile en cours et des trois années précédentes, lorsque les intéressés ont réparé leur omission soit spontanément, soit à la première demande de l'administration avant la fin de l'année qui suit celle au cours laquelle le document devrait être présenté.
L'article 8 de la loi insère une possibilité de régularisation à l'image de celle prévue à l'article 1736 du CGI pour les infractions commises par les tiers déclarants et légalise la tolérance administrative sans toutefois reprendre la notion de « moralité fiscale irréprochable ». Les commentaires de l'administration sont attendus afin de savoir si la notion de « première infraction » sera interprétée de la même manière qu'en matière de régularisation prévue à l'article 1736 du CGI.
Conformément aux dispositions de l'article 8, ces dispositions s'appliquent aux déclarations déposées à compter de la publication de la loi (i.e. ; à compter du 11 aout 2018). Il est possible de s'interroger sur la terminologie de « déclarations déposées » qui peut désigner les déclarations irrégulières déposées ou les déclarations rectificatives rendues possible par cette réforme. Les commentaires de l'administration sont attendus sur ce point.
Extension de la procédure de régularisation spontanée en cas de contrôle fiscal
Actuellement, les entreprises qui font l'objet d'une vérification de comptabilité ou d'un examen de comptabilité ont la possibilité, pour les impôts objet de la vérification, de régulariser les erreurs, inexactitudes, omissions ou insuffisances dans les déclarations souscrites dans les délais, moyennant le paiement d'un intérêt de retard égal à 70% du taux normal l'intérêt de retard (article L 62 du LPF).
L'article 9 de la loi ESSOC étend cette possibilité aux contrôles sur pièces (personnes physiques et personnes morales) et examens contradictoires de situation fiscale personnelle.
Cette procédure de régularisation spontanée ne peut être appliquée que si le contribuable en fait la demande :
- En cas de vérification de comptabilité ou d'un examen de situation fiscale personnelle : avant toute proposition de rectification ;
- En cas d'examen de comptabilité : dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition de rectification ;
- En cas de contrôle sur pièce : dans un délai de trente jours à compter de la réception de la demande de renseignements, de justifications ou d'éclaircissement ou d'une proposition de rectification.
Cette procédure de régularisation spontanée ne peut être appliquée que si :
- La régularisation ne concerne pas une infraction exclusive de bonne foi ;
- Le contribuable dépose une déclaration complémentaire dans les trente jours de la demande de régularisation mentionnée au premier alinéa du présent article et s'acquitte de l'intégralité des suppléments de droits simples dus et des intérêts de retard calculés en application du même premier alinéa soit au moment du dépôt de cette déclaration complémentaire, soit, en cas de mise en recouvrement par voie de rôle, au plus tard à la date limite de paiement portée sur l'avis d'imposition.
L'article 9 prévoit qu'à défaut de paiement immédiat des droits simples ou, s'agissant des impositions recouvrées par voie de rôle, de paiement effectué au plus tard à la date limite de paiement portée sur l'avis d'imposition, le bénéfice de la réduction de l'intérêt de retard est conservé en cas d'acceptation par le comptable public d'un plan de règlement des droits simples.
Conformément à l'article 9 de la loi ESSOC, ces dispositions sont applicables :
- pour les contrôles sur pièces : aux demandes ou propositions de rectifications adressées par l'administration au contribuable à compter du 11 août 2018, date de la publication de la loi ;
- en cas de vérification de comptabilité, d'examen de comptabilité ou d'examen contradictoire de situation fiscale personnelle : aux contrôles dont les avis sont adressés à compter du 11 août 2018, date de la publication de la loi.
Extension de la compétence de la Commission Départementale (article 25)
L'article 25 de la loi ESSOC élargit la compétence de la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires.
Pour rappel, en vertu de l'article L 59 A du LPF, cette commission peut être amenée à intervenir, en cas de procédure de rectification contradictoire, lorsqu'un désaccord porte :
- Sur le montant du résultat industriel et commercial, non commercial, agricole ou du chiffre d'affaires, déterminé selon un mode réel d'imposition ;
- Sur les conditions d'application des régimes d'exonération ou d'allégement fiscaux en faveur des entreprises nouvelles, à l'exception de la qualification des dépenses de recherches en matière de crédit d'impôt recherche ;
- Sur les rémunérations non-déductibles pour la détermination du résultat des entreprises industrielles ou commerciales ;
- Sur la valeur vénale des immeubles, des fonds de commerce, des parts d'intérêts, des actions ou des parts de sociétés immobilières.
L'article 25 de la loi ESSOC élargit la compétence de la commission en lui conférant la compétence de se prononcer sur le caractère de charges déductibles ou d'immobilisation et plus seulement en matière de travaux immobiliers.
A défaut d'indications sur la date d'entrée en vigueur de ces dispositions, cette extension de la compétence de la commission devrait entrer en vigueur le lendemain de la publication de la loi au JO (i.e. ; à compter du 11 aout 2018).
Ces dispositions sont de nature à modifier la manière dont tant l'administration que le contribuable entendent aborder les procédures de contrôle. Toutefois l'ampleur de cet impact dépendra du côté de l'administration, de l'éventuelle frilosité dans l'application ou l'incarnation de certaines des mesures votées (telles la garantie fiscale ou la préparation de l'ordonnance concernant la relation de confiance) et du côté des contribuables de l'appétence réelle pour des procédures de régularisation préalables ou pour une discussion en totale transparence avec la première.