Prestation ajoutée au panier Aucune prestation n'a été sélectionnée. Continuer mes achats Valider mon panier Ajouter au panier Mon panier (0) (1)
prestations
Mon compte Connexion / Création compte Information < Retour aux offres Annuler Fermer Valider

Articles & Actualités

Fiscalité des entreprises

Fusion : les déficits transférés sont des valeurs justifiant un mali technique

18/05/2018

Anne Colmet Daâge - Anne-Lyse Blandin

Au-delà des principes posés par le juge, la prise en compte des déficits transférés pour le calcul du mali de fusion soulève quelques difficultés pratiques.

Statuant conformément aux principes précédemment dégagés par le Conseil d'Etat dans la même affaire#1, la Cour administrative de Versailles vient de juger que les déficits dont le transfert est demandé en application des dispositions du II de l'article 209 doivent être pris en compte dans la valorisation de la société absorbée et, partant, dans le calcul du mali technique, non déductible, minorant d'autant le « vrai » mali déductible#2.

La juridiction confirme que l'économie future d'impôt résultant des déficits transférés par la société absorbée constitue une « plus-value latente » à prendre en compte pour le calcul du mali technique au sens de l'article 745-4 du PCG et qu'ainsi « la prise en compte d'une telle économie d'impôt sur les sociétés en vue de la détermination du "mali" de fusion est donc conforme aux définitions comptables découlant du règlement du 4 mai 2004 que doivent respecter les entreprises en vertu de l'article 38 quater de l'Annexe III au CGI »#3.

La cour écarte l'argument de la société selon lequel l'« actif apporté » devait être évaluée en fonction de sa valeur estimative de marché et de son utilité et, qu'à ce titre, il ne fallait pas se limiter à déterminer la valeur des déficits transférés en fonction de la seule économie d'impôt que ces derniers allaient permettre mais qu'il fallait également tenir compte des charges que l'absorbante supporterait dans le cadre de la poursuite obligatoire de l'activité transférée exigée pour bénéficier des dispositions du II de l'article 209 du CGI.

Cet argument aurait éventuellement pu prospérer si la société avait démontré, sur la base de projections de résultats, que les déficits transférés ne pourraient pas être utilisés dans un avenir proche et que, de ce fait, aucun impôt différé actif n'avait d'ailleurs été reconnu à ce titre dans les comptes consolidés. Par ailleurs, si les règles de report en vigueur à l'époque des faits permettaient l'imputation totale et non limitée, il n'en est plus de même aujourd'hui au regard, non seulement des limitations quantitatives au report, mais également de l'extension conséquente de la notion de « changement d'activité » susceptible d'entraîner la perte des déficits. A l'inverse, le fait que l'agrément conditionnant le transfert des déficits n'ait pas encore été octroyé à la date d'effet de la fusion ne peut faire obstacle à leur prise en compte, dès lors que l'agrément est « de droit ».

En pratique, reconnaitre un mali technique à hauteur des économies d'impôt au regard des seules possibilités réelles d'imputation est susceptible de nécessiter un vrai effort de documentation.

Si les règles comptables et fiscales se rejoignent pour valoriser les actifs et passifs de la société absorbée à la date d'effet de la fusion, signalons que cet alignement n'est pas total : en cas d'acquisition des titres pendant la période de rétroactivité, le mali fiscal devrait, selon l'administration, être calculé en faisant la différence entre la valeur des titres et l'actif net à la date d'acquisition des titres#4. En revanche, au plan comptable, le mali est calculé en retenant la valeur des titres et celle de l'actif net à la date d'effet rétroactif (corrigé éventuellement des variations de capitaux propres de la société absorbée intervenues entre la date d'effet et la date d'acquisition)#5.

Pour finir, si les règles paraissent simples, la pratique est toutefois bien différente.

En effet, les procédures d'agrément étant de plus en plus longues, les exemples dans lesquels le précieux sésame n'est toujours pas octroyé plus d'un an après le dépôt de la demande, et donc postérieurement à la réalisation de l'opération et l'expiration du délai de déclaration, sont multiples. Et si l'agrément reste de droit, l'administration a retrouvé un certain pouvoir de limitation du quantum des déficits transférés au vu des opérations antérieures ayant pu affecter l'activité de la société absorbée.

Il est donc plus qu'urgent que le service des agréments raccourcisse les délais de traitement des dossiers sous peine d'impacter rétroactivement la valorisation des malis techniques. De nouvelles incertitudes en perspective…

Cet article a été publié dans le magazine Option Finance, 30 avril 2018, n° 1460.

[1]CE, 18 janvier 2017, n° 389004, min. c/ Sté Stago International

[2]CAA Versailles, 6 février 2018, n° 17VE00250, Sté Stago International

[3]Position confirmée par l'ANC dans l'exemple d'affectation et de suivi du mali figurant en annexe du titre VII du recueil des normes comptables françaises

[4]BOI-IS-FUS-40-10-20, 12 sept. 2012, n° 20

[5]PCG, art. 751-4